11/07/2012

Rethymno : les mômes assurent en Crète !


"Rethymno 2012"
10 juillet 2012
Blancs : Serntedakis
Noirs : Marc Le Huec

1. e4 c5 2. Nc3 Nc6 3. Bb5 Nd4 4. Bc4 e6
5. Nge2 Nf6 6. O-O a6 7. d3 b5 8. Bb3 Nxb3 9. axb3 Bb7 10. f4 d5 11. e5 d4 12.
exf6 dxc3 13. f5 Qxf6 14. fxe6 cxb2 15. exf7+ Kd7 16. Bxb2 Qxb2 17. c3 g5 18.
Rb1 Qa2 19. Ra1 Qb2 20. Rb1 1/2-1/2

Salut bébé !!!

Nous te rapportons quelques nouvelles du front crétois où les canalistes sont à l'honneur, sous des fortunes diverses et d'ivresse...


La moitié du tournoi a été dépassée hier et il est temps pour un premier debriefing de la situation. A 5 rondes, le redoutable, Inna et le girondin sont en rangs serrés à 3 points, suivant de près Alberto qui prend soin de ne pas nous larguer loin derrière avec ses 3,5 points.


Et ces points perdus, contre qui les ont-ils été ? Contre des petits enfants grecs... Il semble régner un micro-climat non seulement atmosphérique mais également échiquéen dans cette ville magnifique. Classés pour la plupart entre 1400 et 1950, ils font systématiquement des performances en pagaille contre les tendres 2000-2300 venus de l'ouest. 
Juge-donc un peu :

- ronde 1, je prépare pour ce tournoi une variante aiguë et très peu étudiée dans la littérature sur le dragon. Mon adversaire, du haut de ses 10 ans, de son mètre 20 et de ses 1400 Elo, me débite une vingtaine de coups de théorie pour aboutir dans une position très tendue. Au bout de 2h environ, et accusant moi-même un retard à la pendule, je commence à sentir la fatigue poindre sur le visage de mon vaillant adversaire (il faut bien que la force de l'âge serve à quelque chose). Je me résous alors à une combinette me laissant avec la dame et 2 pions contre les deux tours blanches. 

Et là, patatras, mon adversaire inverse 2 coups et se fait planter un mat en 2. Un finish presque frustrant, mais je fus bien heureux qu'il s'achève ainsi !


- ronde 2, Vince le redoutable affronte un enfant d'une douzaine d'années, classé 1800. Nous regardons brièvement sur le site de la Fide sa progression, et là stupeur, malgré ses 1800 il accroche régulièrement des 2200 ! Le redoutable choisit une variante calme de la scandinave afin de faire parler l'expérience. Mal lui en a pris, son adversaire exploite les petites imprécisions blanches et convertit en un point entier ! 


Inna et Alberto nous rejoignent le soir tout sourire, heureux de constater qu'ils n'auront pas été les seuls à subir la loi de l'enfant grec ! En effet, leur premier conseil en apprenant que nous ferions le tournoi avait été de nous dire de nous méfier des petits grecs, connus pour être notoirement sous-classés !

- ronde 4, j'affronte l'adversaire qu'Alberto avait battu lors de la ronde 1. Il joue en moins de 12 ans, est classé 1965, et fait régulièrement de très bonnes perfs. Pire, sa position a été évaluée par moments à +3 face à Alberto ! Celui-ci m'avait donc dit de m'en méfier plus que tout. J'ai les blancs, il répond à mon d4 par une Benoni. J'améliore progressivement ma position jusqu'à gagner un pion. C'est alors que le temps s'en mêle et m'emmêle, et me voilà à jouer une petite imprécision immédiatement exploitée par mon adversaire. Avec une poignée de minutes à la pendule, il sacrifie un 2e pion et trouve un joli perpétuel. Nulle.

Lors de cette ronde, Vincent "triture" un enfant à 1477 Elo pendant 4h avant que celui-ci ne daigne le laisser entrer dans sa position solide comme un roc. 1-0.



- ronde 5. L'incroyable se produit. Nous croyions avoir tout vu avec ses terreurs en culotte courte. Erreur. Ne jamais les sous-estimer. J'apprends comme d'habitude la veille du match le nom de mon adversaire. Je vois qu'il joue l'attaque Tiviakov sur la sicilienne et prépare des variantes très aiguës durant tout l'après-midi. Je me dis qu'au final, si ça ne me sert pas cette fois, cela restera bénéfique. Après tout, mes préparations pour les parties précédentes n'avaient servi à rien, tombant à l'eau au 2 ou 3e coup. Voire au premier... Bref, c'est serein et reposé que j'attaque cette partie. 
Mon adversaire a de nouveau un passif d'annulateur face aux 2200, mais qu'à cela ne tienne, je crois dur comme fer à ma préparation, qui va parfois jusqu'au mat, ou jusqu'à la nulle. Car en effet j'ai les noirs, et sur un jeu parfait des blancs il est dur d'obtenir plus que la nulle. Mon adversaire étant 1900, je me dis qu'il y a peu de chance qu'il connaisse des variantes d'ordinateur jusqu'au 20e coup. Erreur. Ne jamais les sous-estimer vous a-t-on dit.
 La partie débute. On joue rapidement les 5-6 premiers coups. Ma pendule remonte le temps, les coups sont joués très vite. Mon adversaire prend parfois quelques minutes pour jouer, les yeux perdus dans le vague. Il rentre dans la variante la plus aigue. Qu'à cela ne tienne, je rentre fièrement dans une variante de furieux, déroquant mon roi, sacrifiant ma dame, jouant des coups improbables (g5 !). Mon adversaire reste impassible. Rien n'y fera, ni les aller-retours fréquents d'Alberto sur cette partie folle, ni les yeux des 2 tables voisines rivées sur notre échiquier. 
Il me reste 1h34 (pour 1h30 au début de la partie), et 1h20 à mon adversaire lorsqu'il rentre dans la variante de nulle citée plus haut. Le perpétuel est inévitable pour les noirs malgré leur pièce en plus. Nous sommes tous les deux hagards face à ce débit de théorie et d'analyses cybernétiques. Il ne comprend pas, répète les coups et me regarde, interloqué. Nulle. 
J'ai 300 points élos de plus que lui, il me reproduit par coeur une partie de Petrossian (le jeune !), et malgré l'amélioration trouvée par les noirs, rentre dans les meilleures variantes. Il m'avouera à l'analyse qu'il avait étudié cette variante il y a 2 ans, et que c'est la raison pour laquelle il a mis 20 min de plus que moi à jouer. Quel âge et quel classement avait-il à l'époque, je préfère ne pas le savoir... 

C'est toutefois avec le sourire que nous avons analysé ! J'ai ensuite appris que son entraîneur était Kostas, qui n'est autre qu'un des organisateurs du tournoi et très bon ami d'Alberto avec qui nous avions pris un verre le premier soir !
  


- La ronde 6 sera celle malheureusement de la lutte fratricide... Le girondin et le redoutable croisent le fer à la table 26. Cette belle amitié qui nous a conduit à ce tournoi loin de nos terres sera-t-elle entamée par ce duel qui s'annonce épique ? Les pièces vont-elles virevolter ou la partie s'achever rapidement ? Seul l'avenir le dira tant ces deux-là sont imprévisibles...
Marc le Girondin

5 commentaires :

Krusti a dit…

Trés jolie plume Marc.
Un régal.
En même temps si vous pouviez abréger vos vacances, le pays va mal et a besoin de toutes ces forces vives.

Canal Saint-Martin Echecs a dit…

Après un 10/50 en blitz à Santorin en mai, je confirme que la Grèce mérite son AAA aux échecs

Anonyme a dit…

Nous serons de retour au pays bien assez vite pour vous compter de vive voix notre épopée ! Krusti, il te reste quelques jours pour prendre ton billet, l'organisateur de paleochora compte sur ta présence ;)

Dimitri a dit…

Sneaky poneys!
Bien vu :)

Dimitri a dit…

Sneaky poneys...
Bien vu :)