17/12/2012

Voyage au bout du RER A


C'est une équipe inédite qui s'est fièrement levée en ce dimanche 16 décembre pour aller défendre les couleurs du Canal en contrées ouest-parisiennes. Inédite d'abord par sa composition : Schtol, Pilou, le Redoutable et Olga. Inédite ensuite par son capitaine ; j'ai en effet eu l'honneur de signer les deux feuilles de match, je me suis senti grand. Inédite enfin par sa motivation. « Il fallait bien envoyer une équipe », se murmure-t-on sur le chemin.

            Six stations de RER et quinze minutes de marche plus loin, l'accueil dans les locaux de Maison-Laffitte est excellent. Il y avait à cet effet du thé, du café, du jus d'orange, des petits gâteaux, le tout dans des locaux très « cosy » du club de bridge du quartier. Et dire que certains loubards jouent encore des bars bruyants et malfamés...


Attention, on ne renverse pas le Picon sur la table de jeu…

            Les compositions sont révélées, la tâche s'annonce difficile pour Schtol et Olga qui jouent des adversaires mieux classés et réputés pour leur solidité. Maison-Laffitte a notamment l'avantage au premier échiquier, ce qui revêt une importance primordiale en Coupe de France. Pourquoi ? Il faut savoir que le plus dur en Coupe de France, c'est de comprendre les règles. Séance de rattrapage pour les néophytes de cette si particulière compétition :

-Pourquoi le Canal est au second tour sans avoir joué le premier ? Nous sommes qualifiés d'office car nous avons une équipe en NII (« ils sont fortiches, les gosses »).
-Comment les couleurs sont-elles choisies ? L'équipe qui joue à domicile a les blancs au premier et au quatrième échiquier. Parce qu'alterner les couleurs, c'était un peu trop simple.
-Que se passe-t-il en cas d'égalité ? C'est le résultat du premier échiquier qui départage les deux équipes, du deuxième échiquier si le résultat de la première table est match nul, etc...
-Que se passe-t-il dans le cas de quatre matchs nuls ? Il paraîtrait que la plus faible moyenne d'âge l'emporterait. Ce fut en tous cas une tentative habile de Clément S. pour déstabiliser l'arbitre de la rencontre.
-Est-ce qu'une pièce touchée doit être jouée ? Oui. Le fou se déplace également toujours en diagonale. La coupe de France conserve les règles élémentaires du jeu.

            Trêve de règlement, parlons peu, parlons bien, parlons jeu. Tout commence pour le mieux alors que les Canalistes ont chacun recours à leurs « pet-openings » respectives :
-        Au premier échiquier, Clément, casaque blanche et bonnet péruvien, joue son premier gambit de Budapest en partie officielle. « J'en ai rêvé cette nuit », a-t-il d'ailleurs confié au capitaine pour le rassurer. Ou pas. Toujours est-il qu'il s'en sort avec une position confortable après avoir joué g5, g4, h5 et 0-0 lors des dix premiers coups.
-        Au deuxième échiquier, votre dévoué serviteur, casaque noire et t-shirt rouge, a hésité quelques secondes avant d'avoir recours à sa désormais bien connue française b4. Il faut dire que les envolées de pions de la locomotive de l'équipe m'ont beaucoup décomplexé dans le choix d'ouverture.
-        Au troisième échiquier, Vincent, casaque grise et écharpe rose, subjugue l'audience par sa maîtrise du début Ponziani, terreur des puros du vendredi soir. « Je ne suis plus sûr de la théorie », dit-il d'un ton un peu trop modeste pour être honnête. Pari gagnant qui a en tous cas le mérite de faire réfléchir son adversaire.
-        Au quatrième échiquier, Olga, casaque bleue claire et chaussures Puma violettes, mène également à la pendule en jouant une Est-Indienne devenu un gambit Ko-benko (avouez que vous n'y avez pas pensé!) avec une assurance qui efface les 300 points Elo qu'elle rend à son adversaire. « Je vais voir ce que je peux faire », m'avoue-t-elle en souriant après avoir joué le thématique b5.

            L'avance au temps se poursuit en milieu de jeu. Pour une fois qu'il n'est pas capitaine, Vincent joue l'esprit libre des atrocités jouées par les membres de l'équipe I (« mais Marc, pourquoi ne joues-tu pas f5 sur l'est-indienne ?? ») et prend lentement mais sûrement le centre, puis l'avantage, puis les deux pièces contre la tour. Ce n'est plus qu'une question de technique et, malgré une résistance opiniâtre de son adversaire, Vincent ramène le point entier à la maison. Caractérisé par son grand esprit d'équipe, il déclare à la fin de la partie « ouuuuf, je vais peut-être rester au-dessus des 2050 ».
            A sa droite, la partie d'Olga sent bon le côté viande au fur et à mesure qu'elle poursuit méthodiquement son plan : Da5, Tfb8, Cd7, c4, Cc5... La maison blanche tient cependant bon et tout reste à faire à l'approche du zeitnot.

            Au deuxième échiquier (c'est moins narcissique que de dire : « pour ma part » ou « dans ma partie »), les blancs (cf parenthèse précédente) profitent de leur avantage de développement pour rentrer un cavalier dans le camp des noirs et déroquer le roi adverse. Une imprécision est fatale aux noirs et permet au capitaine de rentrer sur la seule colonne ouverte de la position et de tripler côté viande sur la septième rangée pour gagner une pièce.
            On surveille désormais de près l'échiquier de Clément et d'Olga. La différence d'expérience devait parler un jour ; l'adversaire d'Olga garde son sang froid, ainsi que son pion d'avance, pour  concrétiser et remettre Maison-Laffitte sur le droit chemin. Quant à Clément, il nous gratifie d'une position dont il a le secret où il affirme, envers et contre tous, qu'il est bien et qu'il peut tenir la nulle. Un zeitnot et deux arnaques tentées plus loin, son adversaire a inexplicablement un fou de plus, ce qui lui assure un gain facile en finale. Il s'en est fallu de peu ! 2-2 avec une défaite au premier, le jugement dernier ne nous est pas favorable. La messe est dite.


Je n’ai pas menti pour le bonnet !

Une défaite amère mais logique face à une équipe qui a été beaucoup plus réaliste dans les moments cruciaux. Cette déconvenue n'a en aucun cas altéré notre appétit ; Olga a même commandé un Marsala en apéritif (nom de l'adversaire du jour de Vincent, CQFD). Parce qu'au Canal, on a du goût et un certain sens de la dérision.

            Souhaitons bon courage à la très sympathique équipe de Maison-Laffitte pour la suite de la compétition.

            A bientôt pour de nouvelles aventures,

            Pierre-Louis

2 commentaires :

Anonyme a dit…

Merci pour le commentaire, on s'y croirait !
La barre est haute pour les autres commentateurs de matchs du WE !

Albanus Annulator

Anonyme a dit…

Bien joué les gars, deuxième c'est un bon résultat. Si j'avais su que c'était vous aux 2ème et 3ème échiquier, je serai venu vous serrer la louche, bonne continuation. Vincent, de Maisons-Laffitte et de Saverne aussi, enfin, avant.