La croisade du Canal en terre alsacienne
Pour ce tout premier déplacement en
nationale 1, la fine fleur de la chevalerie canaliste avait répondu présente.
Venue des quatre coins du royaume, elle s'apprêtait à partir pour une longue
croisade qui devait durer une année entière afin de conserver le graal obtenu
de haute lutte l'an dernier. L'équipée ne comptait pas huit mais bien douze
joueurs tous plus " fortiches " les uns que les autres
Les douze apôtres du beau jeu
Vince,
le capitaine, qui en fin stratège avait décidé de ne pas prendre part aux
hostilités pour mieux manoeuvrer l'ennemi,
Mike,
acceptant d'interrompre pour quelques jours sa révolution scientifique
copernicienne pour pousser du bois,
Manouk,
venu d'Helvétie pour prêter main forte à l'équipe,
Marc,
fin connaisseur des saintes écritures jusqu'au quarante-huitième coup,
Bébé Ti'Bo,
tête de pont de la charnière alsacienne qui suit.
Stol,
la Lame alsacienne, récent pourfendeur
du plus célèbre des radjas indiens.
Pilou,
revenu de la perfide Albion pour écrire son traité "Trading exotique et
morale protestante, une approche backdoor du commerce",
Vruno,
érudit en culture espagnole que Pilou sollicita à maintes reprises (peut-être
pour faire partager prochainement ses brillants écrits au royaume de Castille),
Bébé
Youssef, qui n'a pas attendu sa naturalisation pour
être adoubé à la table ronde,
Maxime, arrivé
en brandissant fièrement un pot de pâté fait-maison pour prôner la bonne parole
jusque dans les sandwitches,
Marianne,
la féminine de l'équipe, la seule à arborer un polo rose parmi cette foule ivre
de mots finissant par "ouze", de blagues sauce vin blanc, d'analyses
de sous-sous-variantes pointues ou encore de sacrifices douteux et donc
parfaitement justifiés.
Ce sont donc deux charrettes pleines
à craquer qui se sont élancées de Paris pour emprunter les voies rapides en
direction de l'orient. Arrivés à l'heure à l'hôtel Mercure de Mulhouse, les
douze apôtres commencèrent leur mission d'évangélisation avec ferveur.
Le début de la ronde contre Mulhouse
se présente bien. Au premier échiquier Mike
joue avec les blancs face à Patrice LERCH, récemment titré. Au troisième, Marc obtient rapidement une position
dominante face à Quentin BURRI, preuve que les saintes écritures de ses
nombreux ouvrages de théorie lui servent à punir les hérétiques.
Mais l'action
vient, comme souvent, de la charnière alsacienne élargie, bien décidée à
briller à domicile. Bébé Ti'bo,
opposé avec les noirs à Cécile HAUSSERNOT, sacrifie une pièce pour deux pions
et le roque adverse. Stol opte lui
pour une française b4 bien incertaine qui laisse pantois les observateurs même
si "on sait jamais, ça reste Stol". Pilou lui sacrifie également b4
dans une ... sicilienne. Louchant dangereusement sur la case h7, on le sent
très tenté pas une grosse attaque qui justifierait le matériel perdu. L'heure
semblait au miracle ...
" Dès l'ouverture, le pion b sur la quatrième tu
sacrifieras. "
Le chemin de croix
La valse des polos du Canal (huit
joueurs et pas moins de quatre observateurs dans la salle) s'intensifie à
mesure que les positions se détériorent. Entré dans une Philidor, Manouk rend les armes en premier, suivi
de près par Marcus qui après avoir
laissé échappé l'avantage a dû se résoudre à ranger pratiquement toutes ses
pièces actives sur sa première rangée, ce qui même pour "la Serrure"
que je suis n'augurait rien de bon. Marianne,
après avoir souffert dans l'ouverture, se retrouve avec une bonne position face
à son adversaire à qui elle rend quelques centaines de points élo. En zeitnot,
alors qu'elle avait plus de temps que son adversaire, la pendule se déglingue
et Marianne finit par perdre le fil. Un signe du destin, les dieux auraient-ils
abandonné le Canal ?
C'était sans
compter sur Mike, auteur d'une très
bonne partie, qui sur une sicilienne profite que son adversaire n'échange pas
les cavaliers en d4 pour planter le sien en f5. Sacrifiant un pion par la
suite, il continue à se fier à son sens de l'attaque. Les noirs, sans réponse
convaincante à des menaces de promotion du point h malgré le matériel sur
l'échiquier, doivent rendre les armes.
Les noirs viennent de jouer 9 ... Tc8, Mike en profite
pour lancer son poney de l'apocalypse en f5.
Vruno marque à son tour
le point avec les noirs, après avoir joué une formation d5-e6-c6 ultra-solide
il sort quelques pointes tactiques puissantes et retourne patiemment son
adversaire dans une finale avec cavalier et pion supplémentaire contre fou.
¡bien hecho!
Les blancs viennent de jouer f3. Après une ouverture
passive Vruno trouve la pointe Fc5!, reprenant une initiative qu'il ne lâchera
plus jusqu'au gain.
Prenez le temps de
savourer les deux diagrammes : nous ne le savions pas encore, mais ces deux
points seront malheureusement les deux seuls marqués du week-end ...
Le retournement de
situation ne dura en effet qu'un moment. L'attaque de Pilou n'aboutit pas et alors qu'on lui demande de chercher un gain,
celui-ci évite les variantes d'échange et se retrouve à défendre comme il peut
une position avec deux puis trois pions de moins. Il cède finalement malgré des
tentatives fourbes et désespérées dont il a le secret. Après avoir laissé passer
l'orage, Cécile HAUSSERNOT rend la pièce dans de bonnes conditions. La finale à
double-tranchant ne sourit pas à Steinle qui
s'incline. Stol, ramant depuis des
heures, arrive à sauver une nulle relativement improbable. Plantant son roi au
milieu de l'échiquier et décrivant des circonvolutions baroques avec son
cavalier (il me semble l'avoir vu passer en f1 ...), il arrive à tenir en
respect les noirs malgré leur fou agile et leur pion de plus. Résultat des
courses : une défaite 5 - 2 dans un match qui avait pourtant bien débuté.
Pour la deuxième
ronde, Bébé Yousef et Maxime remplacent Pilou et Vruno, ces
derniers se consolant en blitzant à l'infini. Cette rencontre sera assez
largement passée sous silence, le maigre talent de votre humble serviteur pour
entretenir le suspense ayant ses limites. Metz gratifie le Canal d'un cinglant
5 - 0, Marianne, Maxime et Stol étant les seuls rescapés du champ de bataille.
Esprit Canal
Dans ces
conditions, le capitaine sonne la retraite et les remplaçants improvisent un
stand de sandwitches pour remonter un moral durement atteint. Les sourires ne
disparaissent pas pour autant !
Rentrés " broucouilles
" de ce week-end par ailleurs extrêmement réussi sur le plan
extra-échiquéen, les fiers larrons de l'équipe 1 se sont donnés rendez-vous pour
la prochaine ronde qui déjà sera cruciale pour le maintien en N1.
La Serrure
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