La Grande Montée

C'est l'histoire d’un exploit, c'est l'histoire d'une équipe,

Qui comme un seul homme a su se sublimer,

Décrocher la victoire face au terrible Touquet

Avec panache et sans renier ses principes !

Après une saison faste et des succès de haute lutte,

Nous nous retrouvions candidats à la N1.

Même si l'an dernier, nous espérions le maintien,

Cette année nous tendions tous vers ce but.

La solidarité s’exprimait sans ambages :

Alors que le Touquet attendait en son fief

A plus de deux heures de route, Vincent et Youssef,

Non-joueurs, nous évitèrent l'usure du voyage.

Chacun avait fait une excellente préparation :

Marc avec tous ses livres, Ti'Bo prêt à combattre,

Vruno annonçant qu'il allait jouer d4,

Stöhl couché à une heure et torché au Picon.

Le voyage se passa sans problème mais, apparemment,

Fut différemment vécu par chacune des voitures.

Tandis qu'avec Marc, je dissertais ouvertures,

Les blagues de Folatche choquaient tous les enfants.

Les premiers arrivés découvrirent la sinistre place

Où le maléfique Touquet livrait le combat.

En fait, nos adversaires avaient l'air très sympas,

Et on appréciait même le soleil en terrasse.

Grands princes, ils nous laissèrent le temps de déjeuner.

Vincent montra combien son envie était forte :

En coach digne des plus grands, tel Bernard Laporte,

Il nous lut avec grâce la lettre de Guy Môquet !

Cependant, les plats locaux commandés, bien lourds,

Empêchèrent quelque peu notre sang de bouillir.

Ce fut dans une ambiance calme, propice au loisir,

Qu'il fallut se montrer sous notre meilleur jour.

L'enjeu pesait sur tous les protagonistes.

Nous étions tous bien conscients du combat sauvage

Qu'il fallait livrer contre nos rivaux nordistes.

Le match fut lancé après les rappels d'usage.

Marianne et Folatche rendaient 200 points élo.

Alban paraissait en bien meilleure posture

Face à une adversaire qui avait certes de l'allure

Mais dont le style serait bien contré par notre héros.

Toutes les autres parties s'annonçaient serrées.

Notre charnière alsacienne™ jouait la française

Avec les blancs et avec les noirs. Peu à mon aise,

Je me fourvoyai vite au premier échiquier.

Après une heure de jeu où rien ne se dessinait,

Un éclair de Ti'Bo s'abattit en plein centre.

Fd3? Cxd4!! et tout rentre !

Cxd4 Fh4. Le roi, sonné,

Doit abandonner pion et pièce gironde.

En d2 il ôte la ressource Fxh7,

Tandis qu'en e2, la Ta2 bien seulette,

Succombe à une enfilade sur la seconde.

Au sixième échiquier, nous avons pu connaître

Qui est vraiment Vruno, notre sérial buteur.

Dans un match tendu, il fut tant à la hauteur

Qu'il ne peut être décrit que par les mots d'un Maître :

"El Solapado, ténébreux, surmotivé,

Grand prince ibérique à la tour abolie :

Son étoile brille de mille feux - son luth constellé

Lève un obscur Soleil sur toute Ben-Oni."

Merci Gérard*. On attendait une belle arnaque

Et on eut une sacrée leçon de stratégie !

Il s'empare de toutes les cases dans une Ben-Oni,

Etouffe peu à peu son adversaire et le matraque.

Le centre avance, écrase tout et le roi noir trinque.

Mille bravos à Vruno, 7/9 cette saison !

Et merci aussi pour la fameuse "association"...

Le Stöhl a vu son compère Ti'bo sacrifier

Dans une française semi-fermée, bien peu commode.

Il serait faux de penser qu'il s'en est inspiré :

On ne lui a jamais connu d'autre méthode.

L'aile-roi a gardé la trace de ses outrances

La Db2 semble paralyser son jeu.

Dans les positions perdantes, il se sent toujours mieux,

Il s'en tire encore par une superbe séquence :

0-0! Tf8 Cc2!

Rb8 Dd2 Tc8. Contre-jeu ?

c4!! La dame égarée doit battre en retraite !

Db6 Tfb1 L'armée blanche est prête

A mater le roi noir, ce qui prit quelques coups.

Cxe6! Fxe6 Perd la dame

Cc6 et une fois de plus, la Lame

Aura triomphé en ayant bu comme un trou...

Maxime gaffait dans une position solide.

Nous menions 3-1 à la troisième heure de jeu.

L'exploit était proche et le capitaine nerveux.

Qui ferait en sorte qu’il ne devienne livide ?

Au deuxième échiquier, l'éclair frappa encore.

Il a fait rêver tous les lecteurs de ce blog

Avec ses comptes-rendus. En voici l'épilogue,

Qu'il nous offre en personne, lui, le Collector !

Face à un 2m3, il vainc ses vieux démons.

Dans une Nimzo complexe, il gère mieux la pendule,

Jouant de bon coups, sans excès de calcul,

Faisant plus confiance - enfin ! - à son intuition.

Après de nombreuses manœuvres expertes,

Il se retrouvait fin prêt au moment critique :

Quand s'ouvre la position, il régale le public !

fxg6!! Txe2 gxf7

… Rxf7 Fxe2! Le roque fort

N'est plus qu'un gruyère et une rapide mise à mort

Est évidente pour un tel champion de blitz :

... Fxc4 Fh5 Cg6

Te1! Db5 Tf5 Db2

Ce4 Dc2 et c'est la fin.

Cg5!, mat à suivre et 4 à 1 !

Plus qu'un p'tit demi-point pour quitter la N2 !

On s'aperçoit alors que Marianne, valeureuse,

N'a fait aucun cadeau à son 1930.

Alban va tuer son adversaire, mais de mort lente.

Je bluffe avec succès dans une posit' douteuse.

Ainsi le match s'achève sur une large victoire.

C'était un inouï état de grâce collectif

Qui conclut superbement une bien belle histoire.

Du mal à croire que ce fut si expéditif !

On a bien sûr fait un détour par la plage,

En repensant à cette incroyable saison.

Comme un symbole, s'ouvrait un nouvel horizon :

La charnière™ est jolie dans ce beau paysage !

Ainsi Canal 1 finit l'année au sommet.

Le Canal devient le meilleur club de Paris !

En N2, c'est la fin d'une épopée...

...En N1, le début d'une comédie ?

Michaël

*de Nerval. Adapté librement mais surtout n’importe comment de « El desdichado »