jeudi 26 mars 2015
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"La nuit, disent les anciens, porte conseil, rend
à l’égaré du monde, quand bien même il est le sien, la Nordique
miroitante, qui sauve du naufrage et préserve l’essentiel, un sens aux
choses et aux actes.
Ainsi, après un résultat décevant, sans qu’il fut scandaleux (le témoignage précédent vous en convaincra, votre serviteur étant justement le plus serviable, au point d’une négligence de ses intérêts), la fièvre du samedi soir avait plus goût de bile que d’alcool ou d’amours regrettables, chacun pansant ses plaies ou célébrant sa gloire éphémère, avant un lendemain toujours plus présent, dans sa propre postérité.
Fort heureusement, ce 9ème cercle n’était pas matinal, grâce à la célérité de nos hôtes parisiens. Derniers du championnat, vaincus à chaque instance, ils n’en conservaient pas moins un naturel festif, immédiatement perceptible à notre arrivée sur place. Peu d’enjeu dans ce match pour les deux équipes, en ce dimanche, et la quasi-absence de tension s’en ressentait (ou pas, précisément).
La véritable attraction de la rencontre consistait en une question simple, et sans grand suspense, pensions-nous. Christophe, pour ponctuer sa performance dans nos rangs, n’avait qu’une nulle à réaliser contre un joueur inférieur de cent points, n’ayant a priori rien à gagner d’un refus, hormis l’occasion de disputer une partie intéressante, probablement mouvementée, compte tenu du naturel hyperactif du cadet Sochacki. Las, la nulle est refusée, il faudra donc confirmer cette norme de grand-maître sur l’échiquier, une dernière fois ! Wojtek, en cas de victoires consécutives, ambitionnait celle de maître. Gagner, en attendant avril, était donc nécessaire.
La lutte débute dans une ambiance feutrée, sans précipitation dans l’ouverture où que ce soit.
Notre homme de tête, préparé comme il se devait, jouer 1...e5, pour la première fois de sa vie. Il est vrai que le système Glek de Michael Bon doit lui permettre d’égaliser confortablement. Au bout d’une petite heure, avec un avantage déjà conséquent, il propose une parité...encore refusée. A se demander si un pari n’était pas posé contre, ou sur, Christophe.
Pour le grand frère, une habituelle Est-Indienne avec g3, et le léger plus désagréable, qui donnait l’occasion à Marc Le Huec de retrouver l’étrange Db6, sur lequel le président s’applique à obtenir une situation de contrôle total. Un jeu à deux résultats possibles, en principe.
De mon côté, l’anti-vomitif eût été requis, si j’avais été plus malcommode. Quelques coups d’une Espagnole, le sempiternel questionnement par a6, et le lénifiant échange en c6 survint. Le rictus, fataliste, annonçait la couleur : il faut être deux pour danser, et au tango s’était subrepticement substituée la corde. Après avoir égalisé, j’espérais une légère poussée, mais, au terme d’une longue variante forcée amenant une finale de tours aux allures prometteuses, l’inévitable doit être admis : une répétition, pour une poignée de mains que la partie, et l’assurance de mon opposant après elle, n’aura pas réchauffée. 0-0.
Mon voisin n’était guère mieux loti. Dans une Française Steinitz variante classique, James subit un foudroyant g5, qui fait tomber la pointe de sa construction en e5, et le contraint à défendre une mauvaise finale, qui peut encore être sauvée toutefois.
Vincent aura allumé sans tarder le feu d’artifice, pour gagner un pion, un deuxième et l’emporter contre un bon 2100, tout de même. Il est à regretter qu’il ne puisse pas davantage exercer son art cette saison. 1-0.
Roudolph, en meilleure forme que la veille, bâtit un léger avantage solide, à l’instar de son mentor, et prend les commandes de la partie, jusqu’au moment où, impatient, il force le jeu, et perd son ascendant. Une nulle frustrante s’en suit. 1-0. Toujours.
Benoît, à l’inverse, met la gomme, et force la voie par une série de coups d’une violence extrême. Les blancs titubent, et cèdent leur dame pour deux pièces mineures. Le zeitnot fait poindre son hideux masque, qu’il faudra défier, dans les yeux.
Pour Solenn, pas zeitnot, d’hésitations, ou d’attentes : un pion récupéré dans l’ouverture, une attaque toujours maintenue sur le roi noir, et un succès aisé, et sécurisant, qui confirme son retour de sensations après un championnat du monde junior décevant. 2-0.
J’en profite alors pour prendre une petite pause, pour ce que je crois être une victoire sans souci. Las...
Benoît, le premier, est terrassé. Il rend une qualité, puis une tour, sous la panique temporelle, et joint le contrôle dans une position sans espoir. 2-1.
Christophe, ensuite. Alors que je l’avais laissé dans un milieu de jeu favorable, et qu’il m’avait rassuré par sa confiance quand je m’enquérais de la possibilité d’une parité, il git, écœuré, avec une pièce de moins, puis une tour, attendant, par dégoût, et dans l’espoir d’un rachat par Bon, avant de s’incliner. 2-2. Joyeux, exposant sa grandeur au monde alentours, le joueur avec les blancs ne se sera grandi qu’à ses propres yeux. Ou bien est-ce sa vue qui s’est amoindrie...
James sauve un demi-point qui aurait pu être entier, avec un peu plus de réussite. Sa capacité à faire échouer les vaisseaux sur des récifs pervers est à saluer, encore une fois. 2-2, toujours. Plus que Wojtek.
Wojtek, et sa qualité de plus, après un sacrifice, presque celui de la dernière chance, pour éviter l’asphyxie. Mais, alors que deux résultats demeurent probables, un troisième surgit, féroce, injuste, et cruel. Avec deux pions rendus, puis la fameuse qualité, notre second joueur est vaincu par le joueur en second dans une finale de tour et fou de couleur opposée, certainement annulable. Et nous buvons le calice jusqu’à la lie, d’un potentiel 4-1 à un bien trop réel 2-3.
Tristes, l’âme pourrie, gangrénée par la honte, nous quittons les lieux silencieux, comme une procession mortuaire. Souvenons-nous des jours passés, pour cacher la misère présente. Qu’elle est laide, cette misère. "
Canal Saint-Martin 3 - 2 US Villejuif
Ainsi, après un résultat décevant, sans qu’il fut scandaleux (le témoignage précédent vous en convaincra, votre serviteur étant justement le plus serviable, au point d’une négligence de ses intérêts), la fièvre du samedi soir avait plus goût de bile que d’alcool ou d’amours regrettables, chacun pansant ses plaies ou célébrant sa gloire éphémère, avant un lendemain toujours plus présent, dans sa propre postérité.
Fort heureusement, ce 9ème cercle n’était pas matinal, grâce à la célérité de nos hôtes parisiens. Derniers du championnat, vaincus à chaque instance, ils n’en conservaient pas moins un naturel festif, immédiatement perceptible à notre arrivée sur place. Peu d’enjeu dans ce match pour les deux équipes, en ce dimanche, et la quasi-absence de tension s’en ressentait (ou pas, précisément).
La véritable attraction de la rencontre consistait en une question simple, et sans grand suspense, pensions-nous. Christophe, pour ponctuer sa performance dans nos rangs, n’avait qu’une nulle à réaliser contre un joueur inférieur de cent points, n’ayant a priori rien à gagner d’un refus, hormis l’occasion de disputer une partie intéressante, probablement mouvementée, compte tenu du naturel hyperactif du cadet Sochacki. Las, la nulle est refusée, il faudra donc confirmer cette norme de grand-maître sur l’échiquier, une dernière fois ! Wojtek, en cas de victoires consécutives, ambitionnait celle de maître. Gagner, en attendant avril, était donc nécessaire.
La lutte débute dans une ambiance feutrée, sans précipitation dans l’ouverture où que ce soit.
Notre homme de tête, préparé comme il se devait, jouer 1...e5, pour la première fois de sa vie. Il est vrai que le système Glek de Michael Bon doit lui permettre d’égaliser confortablement. Au bout d’une petite heure, avec un avantage déjà conséquent, il propose une parité...encore refusée. A se demander si un pari n’était pas posé contre, ou sur, Christophe.
Pour le grand frère, une habituelle Est-Indienne avec g3, et le léger plus désagréable, qui donnait l’occasion à Marc Le Huec de retrouver l’étrange Db6, sur lequel le président s’applique à obtenir une situation de contrôle total. Un jeu à deux résultats possibles, en principe.
De mon côté, l’anti-vomitif eût été requis, si j’avais été plus malcommode. Quelques coups d’une Espagnole, le sempiternel questionnement par a6, et le lénifiant échange en c6 survint. Le rictus, fataliste, annonçait la couleur : il faut être deux pour danser, et au tango s’était subrepticement substituée la corde. Après avoir égalisé, j’espérais une légère poussée, mais, au terme d’une longue variante forcée amenant une finale de tours aux allures prometteuses, l’inévitable doit être admis : une répétition, pour une poignée de mains que la partie, et l’assurance de mon opposant après elle, n’aura pas réchauffée. 0-0.
Mon voisin n’était guère mieux loti. Dans une Française Steinitz variante classique, James subit un foudroyant g5, qui fait tomber la pointe de sa construction en e5, et le contraint à défendre une mauvaise finale, qui peut encore être sauvée toutefois.
Vincent aura allumé sans tarder le feu d’artifice, pour gagner un pion, un deuxième et l’emporter contre un bon 2100, tout de même. Il est à regretter qu’il ne puisse pas davantage exercer son art cette saison. 1-0.
Roudolph, en meilleure forme que la veille, bâtit un léger avantage solide, à l’instar de son mentor, et prend les commandes de la partie, jusqu’au moment où, impatient, il force le jeu, et perd son ascendant. Une nulle frustrante s’en suit. 1-0. Toujours.
Benoît, à l’inverse, met la gomme, et force la voie par une série de coups d’une violence extrême. Les blancs titubent, et cèdent leur dame pour deux pièces mineures. Le zeitnot fait poindre son hideux masque, qu’il faudra défier, dans les yeux.
Pour Solenn, pas zeitnot, d’hésitations, ou d’attentes : un pion récupéré dans l’ouverture, une attaque toujours maintenue sur le roi noir, et un succès aisé, et sécurisant, qui confirme son retour de sensations après un championnat du monde junior décevant. 2-0.
J’en profite alors pour prendre une petite pause, pour ce que je crois être une victoire sans souci. Las...
Benoît, le premier, est terrassé. Il rend une qualité, puis une tour, sous la panique temporelle, et joint le contrôle dans une position sans espoir. 2-1.
Christophe, ensuite. Alors que je l’avais laissé dans un milieu de jeu favorable, et qu’il m’avait rassuré par sa confiance quand je m’enquérais de la possibilité d’une parité, il git, écœuré, avec une pièce de moins, puis une tour, attendant, par dégoût, et dans l’espoir d’un rachat par Bon, avant de s’incliner. 2-2. Joyeux, exposant sa grandeur au monde alentours, le joueur avec les blancs ne se sera grandi qu’à ses propres yeux. Ou bien est-ce sa vue qui s’est amoindrie...
James sauve un demi-point qui aurait pu être entier, avec un peu plus de réussite. Sa capacité à faire échouer les vaisseaux sur des récifs pervers est à saluer, encore une fois. 2-2, toujours. Plus que Wojtek.
Wojtek, et sa qualité de plus, après un sacrifice, presque celui de la dernière chance, pour éviter l’asphyxie. Mais, alors que deux résultats demeurent probables, un troisième surgit, féroce, injuste, et cruel. Avec deux pions rendus, puis la fameuse qualité, notre second joueur est vaincu par le joueur en second dans une finale de tour et fou de couleur opposée, certainement annulable. Et nous buvons le calice jusqu’à la lie, d’un potentiel 4-1 à un bien trop réel 2-3.
Tristes, l’âme pourrie, gangrénée par la honte, nous quittons les lieux silencieux, comme une procession mortuaire. Souvenons-nous des jours passés, pour cacher la misère présente. Qu’elle est laide, cette misère. "
Canal Saint-Martin 3 - 2 US Villejuif
- f BON Michael 2338 1 - 0 m SOCHACKI Christophe 2413
- LE HUEC Marc 2215 1 - 0 f SOCHACKI Wojtek 2304
- STAHL Clement 2163 X - X LE RUYET Leopold 2251
- STEINLE Thibaud 2080 X - X EDEN James 2271
- GUTIERREZ RAMIREZ Bruno 2114 0 - 1 CAILLE Vincent 2053
- AMARGER Vincent 2080 X - X GRIGORIAN Roudolph 2135
- BROLLY Pierre-Louis 2097 1 - 0 PLUYAUD Benoit 2077
- BOURSIER Marianne 1678 0 - 1 AFRAOUI Solenn 1958
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